Débarcadère de Locodjro, le 18 octobre 2021. Habituellement, cette époque de l’année symbolise la fin de la saison de pêche artisanale à Abidjan. « Habituellement », puisque cette année n’a rien eu d’habituel.
Au-delà des effets de la COVID-19 sur les acteurs et actrices de la pêche en Côte d’Ivoire depuis le début de la pandémie 2020, les femmes mareyeuses ont dû faire face à un autre défi : le poisson n’est pas sorti.
« Ce n’est que maintenant que les premiers poissons commencent à sortir », explique Monique, en montrant des carpes noires et des sérioles (espèce localement appelée saumon) conservées dans la glace, dans des bacs situés le long du débarcadère.
Allongée sur son stand vide, Léonine, mareyeuse au débarcadère, confirme : « Toute la saison, nous n’avons pas travaillé, ce n’est que maintenant que le poisson sort. Mais ça ne va pas durer, peut-être maximum deux mois ». 2 mois, c’est bien moins que les 4 mois environ que dure la saison de pêche artisanale, déjà une courte fenêtre à l’échelle de toute une année.
Pour les femmes de l’USCOFEP-CI, la principale raison de cela, c’est le changement climatique. En tout cas ses premiers signes concrets. Mais les femmes blâment aussi l’utilisation par certains pêcheurs de dispositifs de concentration de poisson (DCP), une pratique qui n’est pas encadrée par la loi, malgré le fait que leur utilisation ait suscité des préoccupations depuis plusieurs années déjà. Selon la présidente de l’Union, Micheline Dion, le recours aux DCP empêche les poissons d’arriver jusqu’aux mangroves. C’est un autre problème contre lequel les professionnels et les experts du secteur doivent se soulever, y compris les organisations internationales comme la FAO : « l’utilisation de DCP va totalement à l’encontre de tout effort de pêche durable, la FAO doit nous aider à faire stopper ces pratiques ».
Ces premières manifestations brutales du changement climatique sur les ressources marines semblent donner raison aux prévisions d’une récente étude publiée par Pain pour le monde « Comment le changement climatique a changé la pêche (seulement disponible en allemand) ». Des prévisions qui inquiètent. La saison de pêche artisanale, aussi courte soit elle, permettait aux femmes de subvenir aux besoins de leurs familles mais aussi de préparer la saison de pêche de l’année suivante. En plus du réchauffement des eaux qui risque de provoquer des migrations de poissons vers des eaux plus froides, les acteurs du secteur craignent de voir s’aggraver certains phénomènes déjà visibles, comme l’érosion côtière qui ronge de plus en plus les côtes aux dépends des populations côtières.
Aujourd’hui, la principale stratégie de l’USCOFEP-CI, c’est l’adaptation. L’Union a entamé un projet de production de maraîchage intégré à la pisciculture, pour fournir du poisson toute l’année ainsi que des légumes non traités. Un projet qu’elle compte étendre à toutes les coopératives de l’Union à travers la Côte d’Ivoire. « Nous ne pouvons pas attendre que des solutions soient trouvées pour nous, il faut anticiper. C’est notre mission en tant qu’Union » (M. Dion).
Note: Cet article a été publié à la base sur le site de l'USCOFEP-CI, il a été traduit en anglais pour la version EN du site web de CAPE et reproduit avec l'autorisation de l'USCOFEP-CI.
Photo de l’entête : Les femmes de la coopérative d’Abobo, par Andréa Durighello, pour l’USCOFEPCI.
A la suite de l'émission d'un carton jaune au Sénégal de la part de l'Union européenne (UE), les négociations de l'accord de pêche entre l'UE et le Sénégal sont au point mort. Avec le carton jaune du Sénégal, les négociations de l'accord de pêche entre l'UE et le Sénégal sont au point mort. Au même moment, l'UE négociera le renouvellement de son APPD avec la Gambie, dont les eaux sont bordées de part et d'autre par celles du Sénégal. Comment les flottes de l'UE vont-elles utiliser l'accès aux eaux gambiennes, alors qu'elles risquent de se voir interdire l'accès aux eaux sénégalaises ?