À l'issue de leur 8e réunion ministérielle, les ministres de OEACP (Organisation des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique) chargés des océans, des eaux intérieures et de la pêche ont adopté une déclaration dans laquelle ils s'expriment d'une seule voix sur la gouvernance des océans, la pêche durable et l'aquaculture.
La déclaration aborde la plupart des sujets brûlants de la pêche : la lutte contre la pêche INN, la bonne gouvernance, la transparence, les subventions à la pêche, entre autres. Il convient de noter que, sur la plupart de ces sujets, les ministres mettent l'accent sur la pêche artisanale, qu'ils décrivent comme « le pilier du secteur de la pêche de l’OEACP, qui s'ancre depuis longtemps dans les communautés, les traditions et les valeurs locales ».
Les ministres de l'OEACP appellent à l'implication des communautés de pêche dans la cogestion comme voie vers la conservation de la biodiversité
Saluant le Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, les ministres ont appelé à une « approche centrée sur l'humain » en matière d'utilisation durable et de conservation de la biodiversité aquatique. Pour y parvenir, ils ont souligné la nécessité de garantir l'accès des hommes et des femmes dans la pêche artisanale aux zones de pêche en encourageant « la création de zones de gestion artisanale en fermant définitivement à la pêche industrielle et à d'autres activités industrielles les zones côtières ou les zones de plateau plus étendues où évoluent la pêche artisanale. »
Ils ont également appelé les membres de l'OEACP à promouvoir la cogestion réelle de 100 % de ces zones avec les communautés de pêche artisanale, ce qui permettrait « d'améliorer la gestion durable du secteur de la pêche artisanale, de maintenir des stocks de poissons sains, de garantir les moyens de subsistance et de contribuer de manière substantielle aux objectifs de conservation, y compris à l'objectif 3 du Cadre mondial pour la diversité biologique de Kunming à Montréal ».
Ce message rejoint celui des communautés de pêche artisanale ACP dont le représentant a eu l'occasion d'intervenir lors de la réunion ministérielle de l’OEACP : « lorsqu'il est démontré que la conservation de la biodiversité est le résultat direct de l'établissement de zones réservées à la pêche artisanale, interdites à la pêche industrielle, cogérées par les communautés de pêche artisanale et le ministère de la pêche, alors ces zones devraient être considérées par nos États comme des contributions à l'objectif des "30 x 30". » En vue de concrétiser cet engagement, les ministres ont demandé au secrétariat de l'OEACP d'établir un groupe de soutien technique pour aider les pays membres à mettre en place des zones de gestion artisanale, ou des dispositifs similaires, « qui promeuvent une cogestion efficace et inclusive des zones de pêche artisanale et pour contribuer aux objectifs globaux du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal. »
Les ministres de l'OEACP ont en outre encouragé la mise en place de systèmes de cogestion pour 100 % de toutes les zones côtières, en mettant en place « des cadres politiques et juridiques favorables qui définissent clairement les rôles et les responsabilités des autorités et des pêcheurs, en fournissant le soutien approprié aux communautés pour qu'elles s'engagent dans la mise en œuvre des mesures de gestion, y compris des mesures de conservation et de gestion. »
Cela répond à l'opinion exprimée en juillet dernier, lors du Comité des pêches de la FAO, par des organisations de la société civile (OSC), selon laquelle, pour que la surveillance participative fonctionne, « les communautés de pêche artisanale doivent disposer d'un équipement adéquat qui leur permettent d'informer directement les autorités d'activités suspectes. De plus, les rôles et responsabilités respectifs des pêcheurs et des autorités doivent être clairement définis ». Ces OSC ont également demandé à la FAO « d'organiser une discussion, avec les membres et les pêcheurs qui le souhaitent, sur la manière de faire progresser une surveillance participative efficace ». Avec leurs partenaires, comme les pays de l'UE, les membres de l'OEACP pourraient faire beaucoup pour faciliter une telle initiative.
L'OEACP soutient ses communautés de pêche dans leur lutte pour s'adapter au changement climatique
Les communautés de pêche artisanale de l'OEACP subissent déjà les effets du changement climatique. Citons un exemple frappant en Afrique de l'Ouest, où les ressources de petits pélagiques surexploitées, essentielles pour la sécurité alimentaire de la région, ont récemment migré d'environ 200 km vers le nord en raison de l'augmentation des températures de l'eau de mer, privant encore davantage les communautés de côtière du Sénégal et de la Mauritanie.
Face aux menaces que le réchauffement climatique fait peser sur la pêche, les ministres de l'OEACP ont exprimé leur vive inquiétude face aux impacts visibles et croissants du changement climatique, « notamment l'augmentation de la température des océans et de l'eau de mer, l'acidification, l'élévation du niveau de la mer, les changements dans l'abondance et la distribution des espèces aquatiques, y compris les poissons, et la diminution de la biodiversité marine ».
Ils ont également noté que la santé du milieu océanique – et des communautés dont les moyens de subsistance dépendent d'un environnement océanique sain – dépend fortement « de sa capacité à renforcer et rétablir sa résilience ». Les ministres ont donc appelé à renforcer la préparation et l'adaptation face à la dégradation de l'environnement, aux catastrophes naturelles et au changement climatique, en demandant « un financement durable et un soutien technique pour des interventions locales, réactives et innovantes ». Les objectifs comprennent, par exemple, le renforcement d'une protection sociale adaptée, des capacités d'alphabétisation financière pour « nos communautés de pêche vulnérables, y compris les femmes, les jeunes et les populations autochtones ».
L'OEACP plaide également pour l'inclusion des préoccupations des communautés de pêche artisanale dans le Fonds des pertes et dommages de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), afin de répondre aux besoins des communautés qui font face au changement climatique en première ligne.
Par cette déclaration, les 79 membres de l'OEACP appellent résolument tous les membres à plaider en faveur de la pêche artisanale, non seulement auprès des partenaires traditionnels de l'UE, mais aussi au niveau international - institutions de l'ONU, Sous-comité de la gestion des pêches de la FAO, CCNUCC, ou avec banques régionales de développement de l'OEACP « en mettant en avant le partage des bonnes pratiques et des leçons apprises ». Il faut s'en féliciter, à un moment où les pêcheries artisanales d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique sont confrontées à des défis de plus en plus importants.
Photo de la bannière : une femme transformatrice de poisson qui montre une technique de fumage ivoirienne.
L'auteure formule 4 recommandations qui vise à rendre la dimension extérieure de la PCP plus efficace : (1) l'UE devrait passer d'accords d'accès à des accords de gouvernance des pêches, (2) tout en continuant à soutenir la participation éclairée des parties prenantes dans les pays tiers ; (3) elle devrait veiller à ce que tous les navires d'origine européenne, y compris ceux qui se repavillonnent, respectent les normes de durabilité ; et (4) elle devrait s'engager activement au niveau international à promouvoir des accords d'accès transparents, équitables et durables applicables à toutes les flottes d'origine étrangère qui pêchent dans les pays en développement.