Lorsque les Nations unies se sont mises d'accord, en 2015, sur les Objectifs de développement durable, elles ont demandé, à travers l'ODD 14b, que l'accès au marché soit assuré à la pêche artisanale.
En Afrique, l'amélioration de l'accès au marché pour les produits de la pêche artisanale est essentielle pour maximiser la contribution de la pêche à la sécurité alimentaire. Les femmes de la pêche artisanale africaine, qu'elles préparent, transforment ou commercialisent le poisson capturé par les pêcheurs artisanaux, jouent un rôle essentiel pour apporter ce poisson aux millions de consommateurs africains. Les produits de la pêche artisanale ne sont pas seulement une source de protéines, ils fournissent également des nutriments essentiels et peuvent jouer un rôle important dans la lutte contre les carences nutritionnelles connues :
Les femmes africaines actives dans la pêche artisanale apportent également une part importante des revenus du ménage. Antonia Adama Djalo, présidente du Réseau national des femmes de la pêche artisanale en Guinée-Bissau (RENAMUP-GB) et également de la Fédération des associations de femmes du secteur économique (AMAE), souligne le rôle central des femmes dans les communautés de pêcheurs côtiers : « Ce sont les femmes qui, par le biais de la transformation, font en sorte que le poisson pêché par les pêcheurs artisanaux vaille son poids en or, et que cela profite à leurs familles et à leurs communautés ».
Ainsi, pour permettre l'accès au marché des produits de la pêche artisanale, conformément à l'ODD 14.b, d'une manière qui améliore la sécurité alimentaire et réduise la pauvreté dans les communautés côtières, il est essentiel de s'attaquer aux difficultés rencontrées par les femmes travaillant dans ce secteur.
Innovation pour améliorer les conditions de travail et de vie
L'utilisation des fours traditionnels pour fumer le poisson pose d'importants problèmes aux femmes : manque d'hygiène, mauvaise qualité du produit fini, - ce qui entraîne une faible commercialisation -, et problèmes de santé. Les femmes travaillent souvent plus de douze heures par jour, longtemps après la tombée de la nuit, dans des sites peu hygiéniques, dans la chaleur et la fumée permanentes émanant des fours. Cela endommage irrémédiablement leurs yeux et leurs poumons, sans compter le risque de brûlures graves.
Les pratiques traditionnelles de fumage ont également des conséquences sur l'environnement côtier et les ressources halieutiques. La consommation excessive de bois pour le fumage du poisson contribue à la déforestation, notamment des mangroves, et les pertes post-récolte élevées constituent un gaspillage des ressources halieutiques et une source de pollution côtière.
Au début des années 2010, au Sénégal, plusieurs organisations se sont associées pour développer un four amélioré, appelé le FTT, à partir de modèles existants, en utilisant des matériaux disponibles localement, et bien adapté aux opérations artisanales de transformation du poisson. Les fours FTT ont apporté une solution pertinente en termes de qualité, de santé et d'environnement car ils augmentent la qualité des produits, réduisent l'utilisation du bois de chauffe et diminuent l'exposition des femmes à la fumée. Il est désormais utilisé dans plusieurs pays africains, ce qui améliore à la fois les conditions de travail et de vie des femmes et les bénéfices, en réduisant les pertes post-récolte et en permettant un meilleur accès au marché.
Bien sûr, l'amélioration des techniques de transformation ne résoudra pas toutes les difficultés que rencontrent les femmes pour accéder aux marchés. « Il y a d'autres obstacles à nos activités de transformation, comme la conservation du produit frais pour la transformation. Pour cela, il y a de nouvelles techniques, comme l'utilisation de l'énergie solaire, auxquelles nous devons penser », ajoute Adama Djalo. L'utilisation de conteneurs frigorifiques alimentés par l'énergie solaire fait son chemin dans des pays comme le Sénégal, la Côte d'Ivoire et le Kenya.
Ces innovations sont essentielles à la stratégie des femmes africaines travaillant dans la pêche pour améliorer leurs conditions de travail et continuer à fournir aux consommateurs africains des produits essentiels et délicieux.
Alors que l'Année internationale de la pêche artisanale et de l'aquaculture bat son plein, les gouvernements africains et leurs partenaires devraient soutenir en priorité les innovations développées par et pour les femmes du secteur de la pêche artisanale, afin d'atteindre les objectifs de développement durable.
Photo de l'entête : Une femme fumant du poisson à Kafountine, Sénégal par MEDIAPROD.
En septembre 2024, les Ministres en charge de la Pêche de l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) se sont rencontrés à Dar es Salaam (Tanzanie) pour échanger sur le thème « Accélérer les actions pour les océans, une pêche et une aquaculture durables et résilients dans les pays et régions membres de l’OEACP ».