Echange de vues avec Mr Alain Cadec, Parlementaire européen, Président de la Commission de la Pêche du Parlement européen
Le Parlement européen a joué un rôle important dans l’élaboration de la nouvelle Politique Commune de la Pêche de l’Union européenne (PCP), notamment les dispositions qui s’appliquent aux relations de pêche avec les pays tiers (la ‘dimension externe’). Comment concevez-vous l’implication du Parlement Européen dans la phase de mise en oeuvre?
Il est très important pour le Parlement européen de participer activement à la mise en oeuvre de la dimension externe de la PCP. En effet, le Conseil des Ministres européens de la pêche a énormément de prérogatives, notamment pour la conclusion des Accords de partenariat de pêche durables. Il est primordial pour le Parlement de maintenir son pouvoir et de veiller à être constamment informé par la Commission et le Conseil à toutes les étapes des négociations d’accords. Le Traité de Lisbonne nous confère le pouvoir d'approuver ou non les accords internationaux négociés par la Commission, utilisons-le à bon escient!
Aujourd’hui, la plupart des accords de partenariat sont des accords thoniers. Quel est pour vous l’avenir des accords mixtes, qui incluent non seulement l’accès aux ressources de thons, mais aussi l’accès des flottes de chalutiers?
Les accords mixtes sont par essence plus compliqués à négocier que les accords thoniers. Cependant, nous ne pouvons pas nous cantonner uniquement à des accords de partenariat pour la pêche au thon. Plus de 70% des produits de la pêche consommés en Europe proviennent des importations de pays tiers - notre dépendance ne doit pas s'accroitre à présent!
Dans le cadre des négociations en cours avec la Mauritanie, il y a un blocage notamment sur la question de la compensation financière: l’UE veut un accord où le paiement est dimensionné aux possibilités de pêche offertes, mais pour la Mauritanie, la compensation financière est un droit d’accès, visant à réserver une part du surplus de ressources pour l’UE, qui ne doit pas être confondu avec le prix du poisson payé par l’armateur à la tonne pêchée. Quel est votre point de vue?
L'accord avec la Mauritanie est important pour l'Union européenne. Il représente la possibilité de pêche la plus importante pour l'Union européenne et offre des possibilités de pêches de plusieurs espèces. Des navires espagnols, français, polonais, portugais et italiens exercent leurs activités dans ces eaux. La Commission européenne doit prendre en considération ces enjeux lors des négociations. Il est vrai que pour l'instant, les négociations avec la Mauritanie sont quelque peu compliquées notamment en termes de compensations financières. Les négociations servent à s'accorder sur une définition de ce qu’est cette compensation afin que les deux parties y trouvent leur compte.
Lors de la précédente législature, vous avez fait un rapport sur les conditions de durabilité sociale et environnementale) à appliquer aux importations. Selon vous, comment va évoluer ce débat?
Le secteur de la pêche européen est encadré par des normes sociales et environnementales de plus en plus contraignantes pour les producteurs. Il est donc primordial d'intégrer le même principe de conditionnalité aux pays tiers exportateurs sur le marché européen.
Les produits de la pêche sont par nature des produits sensibles au même titre que les produits agricoles, ils doivent impérativement être considérés comme tels dans le cadre des relations commerciales entre l'Union européenne et les pays-tiers. Nous devons exiger une totale réciprocité de la part de nos partenaires commerciaux avant de libéraliser à tout va notre marché.
J'avais expressément demandé dans mon rapport que les produits de la pêche et de l'aquaculture soient traités par le Commissaire chargé de la pêche et des affaires maritimes lors de négociations d'accord de libre-échange de la même manière que les produits agricoles sont traités par le Commissaire chargé de l'agriculture. À présent nous n'avons même plus de Commissaire chargé exclusivement de la pêche et des affaires maritimes, le portefeuille des affaires maritimes et de la pêche a été fusionné avec celui de l'environnement.
La Commission Européenne a proposé d’envisager la révision de la réglementation sur les autorisations de pêche, pour améliorer le suivi des activités des bateaux européens qui pêchent en dehors des eaux européennes, notamment ceux qui pêchent en dehors du cadre d’accords de partenariat ou d’organisations régionales de pêche (licences privées, affrètement, etc). Quel est votre point de vue ?
La proposition de la Commission européenne de réviser la réglementation sur les autorisations de pêche n'est pas une mauvaise idée. A ce stade, la Commission propose une révision allant dans le sens d'un système plus simple, qui permettra de fournir des données plus fiables et d'avoir un meilleur contrôle de la pêche.
Nous avons mis en place des instruments tels que la Politique commune de la pêche, le règlement contrôle et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche. D’autre part, la transparence, le contrôle des activités de pêche et la lutte contre la pêche INN sont des objectifs prioritaires pour la Commission de la Pêche du Parlement européen
Pour avoir une efficacité maximale de ces instruments et atteindre ces objectifs, nous devons assurer une cohérence entre les règles appliquées aux flottes européennes pêchant dans les eaux de l’UE et celles pêchant en dehors’. La révision de cette réglementation sur les autorisations de pêche aidera à cela.